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Lecture d'un chapitre



Lecture du chapitre 1
Nom de l'œuvre : Eter City [Election - 2017] Nom du chapitre : Héros posthume à la Une
Écrit par Requiem Chapitre publié le : 18/6/2017 à 23:49
Œuvre lue 4501 fois Dernière édition le : 5/10/2017 à 12:15
Eter City
- Avant les évènements Soleil et Lune -


Héros posthume à la Une


« Bonjour, vous êtes sur Akala TV. Ici, Vahïna de l’émission [i]Touche Pas à Mon Pokémon et je serai votre hôtesse pour la soirée ! Au programme de cette édition spéciale, le reportage exclusif sur la spectaculaire arrestation de l’organisation criminelle du Syndicat des Team !

Pour parler de cette incroyable histoire un de nos invités est un expert du grand banditisme international ; toujours sur le coup quand règne le crime et jamais très loin du grabuge, cela fait 8 ans qu’il parcourt le monde pour récupérer des preuves sur les méfaits des méchants. Oui, vous avez bien deviné, c’est bien lui, merci d’accueillir l’agent des Forces de Police Internationales le plus célèbre au monde, j’ai nommé, le beau, le bel, Beladonis ! »

« Hm. Bonsoir. En fait, quand je suis arrivé tout était déjà fini. »

« Ah. Ah. Quelle modestie ! Mais ce n’est pas tout. Egalement présente sur le plateau ce soir, la Présidente de la Fondation Æther qui, comme vous allez le découvrir, a joué un rôle majeur dans ce coup de filet : Elsa-Mina Æther ! »

« Oh, vous me gênez, je n’aurais rien pu faire sans mon équipe et mon agent infiltré. »

« C’est que tous nos invités sont modestes ce soir, ça nous change des politiques ! Ah. Ah. Ah ![/i] »

D’une pression du pouce sur la télécommande, Mohok mit sur pause l’enregistrement et poussa un gros soupir.

- Quelle émission stupide...
A côté de lui, Jamila haussa ses épaules, dont la robe ample laissait dénudées, et répondit entre deux mastications de chewing-gum :
- C’est quand même à cause de cette émission stupide que la Fondation Æther a réussi à se poser en sauveur des peuples et des Pokémon.
- Les citoyens sont stupides, trancha Mohok.
- Et c’est pour leur apporter la lumière que nous faisons ce si beau métier !

L’homme corpulent ne releva pas l’ironie de sa jeune collègue. Après un quart de siècle dans la profession journalistique il savait pertinemment que le peuple était et resterait stupide. On aurait beau leur mettre sous le nez toutes les preuves que l’on voulait, si le sacro-saint peuple avait décidé que vous étiez innocent, alors vous étiez innocent.

Comment expliquer sinon, malgré les nombreux soupçons de maltraitance, de disparition et bien d’autres exactions à la frange de la légalité, que la dirigeante de la Fondation Æther se plaçât parmi les favoris de la prochaine élection ? Le peuple allait pour la première fois élire un Maître Pokémon pour représenter Alola dans la Convention des Ligues, et c’était à cette femme cachottière et maniaque qu’il voulait s’en remettre ? C’en était à se taper la tête contre un mur.

Consciencieux et professionnel, Mokoh n’en épluchait pas moins, et avec attention, toutes les apparitions des membres de la Fondation Æther pour tenter de trouver un nouvel indice, une piste, qui prouverait une bonne fois pour toute que la famille qui était à sa tête était pourrie jusqu’à la moelle et que les disparitions de Pokémon étaient fondées. Le vieux journaliste appuya une seconde fois sur la télécommande.

- C’est reparti…

« Pour nos chers téléspectateurs laissez-moi vous résumer les faits. Depuis vingt ans, le Syndicat des Team imposait la terreur dans le monde depuis sa base d’Eter City via ses branches régionales. L’organisation, impénétrable, et, telle une hydre dont on coupe une tête pour en voir aussitôt repousser deux, résistait depuis toujours aux tentatives d’infiltration de la police.

C’est il y a déjà sept ans qu’entre en scène deux personnages incroyables que rien ne prédestinait à devenir ceux qui feraient tomber la plus puissante organisation criminelle au monde : l’héritière de la famille Æther qui œuvre pour la sauvegarde et la protection des Pokémon. Et Ahou, un Pokémon célèbre pour ses performances combattives dans la compétition internationale.

Et je suis fière de dire que c’est sur ce même plateau, que ces deux êtres hors du commun se rencontrent pour la première fois. Elsa-Mina est une idéaliste qui rêve d’un monde meilleur grâce à la construction d’un paradis pour Pokémon. Ahou a déjà vécu bien des aventures avec son dresseur Païzanou mais aussi à Hoenn sous la bannière de l’écurie Devon SARL. Et c’est à partir de ce moment qu’ils décident de détruire le Syndicat dans le plus grand secret.

Nous connaissons tous cette histoire incroyable et l’héroïsme dont a fait preuve Ahou. Maintenant que le Syndicat est tombé et que la police a pu investir Eter City la paix et la sérénité vont enfin être restaurées de par le monde.

C’est grâce à l’implication d’Alola dans cet heureux dénouement que le Conseil National vient de rétrocéder l’île à notre gouvernement, permettant ainsi l’ouverture de pourparlers pour intégrer notre région dans la Convention des Ligues. La première étape du processus étant l’élection d’un Maître Pokémon qui aura lieu le mois prochain. Il – ou elle – aura la lourde charge de nous représenter au niveau National.

D’ailleurs, Elsa-Mina devenue entretemps notre héroïne vient tout juste de se déclarer candidate. Je lui laisse donc la parole.
»

Mohok grogna. Une héroïne ! Manquait plus que ça. Sur l’écran, la superbe femme tout de blanc vêtue qui se tenait au côté du policier aussi raide qu’un piquet, se leva gracieusement et sourit à la caméra.

« Je voudrais d’abord profiter d’un instant pour rendre hommage à Ahou, sans qui rien de tout cela n’aurait été possible.

Il y a eu beaucoup de rumeurs sur les circonstances de son décès. Alors laissez-moi dissiper vos doutes une bonne fois pour toutes : blessé grièvement pendant l’assaut par un Pokémon du Syndicat, notre équipe d’intervention l’a aussitôt transporté d’urgence jusqu’au refuge de notre Paradis Æther dont la construction vient tout juste de s’achever après sept ans de travaux fastidieux. Et malgré sa rage de vivre et tous nos efforts déployés pour le maintenir en vie, il est décédé quelques instants avant son arrivée dans notre centre de soins intensifs.

Je vous le dis, c’est une grande perte pour la Fondation comme pour moi. Mais sa mémoire devra être honorée comme il se doit ! Un monument commémoratif sera prochainement érigé en son honneur dans notre Paradis afin que tous se souviennent de la valeur de ce héros qui n’a pas hésité un instant à mettre sa vie en jeu pour notre bien à tous.

Et c’est avec cette même détermination que je compte représenter l’archipel d’Alola si je devais être élue. Je crois en la coopération entre les régions, et aux ressources que l’ouverture sur le monde pourraient apporter aux îles. Il est temps de se défaire des relents de la royauté qui nous empêchent de réaliser notre plein potentiel et de mettre de côté les vieilles intrigues politicardes pour nous permettre de nous élever au même rang que les plus grandes régions.
»

- Ce qu’elle ne dit pas c’est que son industrialisation forcenée marquerait la fin de nos parcs régionaux. Où iraient les Pokémon dont on a détruit les habitats naturels ? Dans leur fameux Paradais. Ha !
- Il parait que la Fondation a la technologie pour préserver artificiellement l’habitat naturel de chaque espèce de Pokémon, intervint Jamila.
- La technologie… Peuh ! Regarde où ça a mené Unys en son temps.
- Ouh tu parles comme un vieux, comme si tu avais toi-même connu la Grande Gu…

Soudain l’image se déforma et des grésillements saturèrent les haut-parleurs du poste de télévision en empêchant la jeune fille de terminer sa phrase. L’image tressauta encore pendant quelques secondes suivies d’un son aigu et la tête et le buste d’un homme relativement jeune apparurent à l’écran.

« BON CA VIENT, WOUSH ? Ah, on est en ligne ? Ok, je vois tous les boutons de la caméra qui s’alignent.

Salut les crevards, mon blaze à moi c’est Guzma. Pas Rocket, Pas Plasma. Pas Aqua, Pas Magma. Vous pensiez être tranquille parce que le Syndicat des Team a été anéanti ? Eh bien vous aviez tort ! Xar me voici ; moi le cauchemar des nantis. Ne me prenez pas pour un fou. J’ suis le nouveau chef de la Team Skull et j’ai un message pour vous ! Moi et mes potes on va débarquer. Sur toutes les îles, pour vous braquer vos Poké.

Alola la tranquille, Alola la paisible tout ça c’est terminé. Rentrez vos enfants, rentrez vos rocabots. On les harcèlera qu’il pleuve ou qu’il fasse beau. On va tout détruire. Tout faire pour vous nuire. On se sera derrière vous pour voler vos achats. Tremblez mortels, à chacun de vos pas. Du bruit, du vacarme. Voilà ce qui fait mon charme.

Alors vous m’avez bien compris ? Capisce ? Entiendo ? N’oubliez pas, la TEAM SKULL EST LA ET VOUS ALLEZ PRENDRE CH…
»

L’écran devint noir. Mohok resta interdit quelques secondes puis tourna la tête vers Jamila.
- Quoi ? C’est tout ? Et la suite ?
- L’enregistrement s’arrête ici, dit platement sa partenaire. Apparemment la police a pu prendre la main et couper l’antenne qui avait été piratée à distance.
- Un taré pirate la chaîne principale d’Akala et personne dans les forces de l’ordre ne pense à le localiser avant de couper l’émetteur ?
- Faut croire.
- Quel manque de professionnalisme !

Jamila pencha sa tête sur le côté et dévisagea son aîné d’un air narquois. Mohok resta silencieux un instant puis finit par éclater :

- Oh ça va, hein ! Est-ce que je me mêle de ton boulot, moi ?
- Tu me demandes toujours de filmer ton meilleur profil, s’écria la jeune fille en riant. Enfin bon, je peux me renseigner auprès de Tawan, il aura peut-être des pistes… mais ça va demander du temps.
- Ouais. Fais ça, petite. Du temps. Dans moins d’un mois la princesse Æther sera sacrée Grande Reine de la pluie et du beau temps face à une opposition inexistante… sauf si on compte la Ruche Ouvrière qui prône la libération des Pokémon et refuse de faire entrer Alola dans la Convention... Il y a bien Euphorbe qui semble raisonnable mais il n’a ni les moyens financiers ni l’aura que dégage Æther pour espérer gagner. Mais à part ça tout va bien. On a le temps. Puis il ajouta d’un ton moins sarcastique : Bon je suis vanné. Je sors un moment m’en griller une. Il faut que je réfléchisse.
- Ok, boss. Je prépare le camion pour cet après-midi.
- Cet après-midi ?
- Nous avons le concours du plus beau bikini à couvrir à Kécké Plage. Ordre du chef.
- Ah. Oui. Super.

Mohok laissa donc sa camerawoman vaquer à ses lourdes tâches pour ne pas arriver en retard au grand scoop auquel le journal allait consacrer sa prochaine Une. Au moins il pourrait se rincer l’œil se consola-t-il en allumant sa cigarette.

Du temps.

Du temps, elle en avait cette petite. Mohok un peu moins. Il passa une main sur la bedaine qui tendait le tissu de sa chemise aux couleurs fatiguées. Une vie remplie de malbouffe, de nuits blanches, d’alcool et de cigarettes. Il se sentait fatigué. Très fatigué. Allez mon vieux, se disait-il, encore un scoop et tu arrêtes tout. Il tenait comme ça depuis 25 ans. Il avait l’impression d’en avoir 100. Il n’en avait que la moitié.

Le prochain scoop, il en était sûr, serait le dernier. Le temps... Bah ! Depuis quand mesurait-il le temps lui ? Il pensa à sa visite chez le médecin. L’homme en blouse blanche tenait un épais dossier portant son nom en lettres grasses : Mohok Likki. Les yeux du médecin étaient vides. Sur son visage inexpressif, seules ses lèvres affichaient un triste sourire. « Monsieur Likki, j’ai une mauvaise nouvelle… »

Le vieux journaliste s’ébroua pour s’empêcher de penser à la conversation qui avait suivi. Il porta sa cigarette à ses lèvres puis, se rendant compte de son geste, regarda avec circonspection le petit objet cylindrique qui fumait entre ses doigts.

- Bah ! Foutu pour foutu, grommela-t-il en tirant une dernière bouffée.

D’une pichenette il envoya voler la cigarette dans le bac à fleurs qui servait de cendrier au personnel du journal.

*


Quand il entra chez lui, Mohok avait une furieuse envie de s’en griller une. Il avait jeté son dernier paquet dans une poubelle de Kécké Plage et le manque de son goudron quotidien lui brûlait maintenant la gorge.

Il resta un moment à fouiller son meuble à l’entrée dans l’espoir infime de s’en dégotter un autre, oublié au milieu du fatras de clés, de papiers froissés et de résidus poussiéreux. N’ayant pas débusqué son remède miracle il se résigna et alla allumer la lumière de son salon.

Là, entre les piles de livres qui débordaient des étagères ou trainaient par terre, les vieux journaux défraichis, la table sur laquelle trônaient la machine à écrire dont il était si fier et les tasses sales remplies à moitié de café froid, les affaires fripées jetées négligemment sur le dos d’une chaise, et la fine pellicule de poussière qui couvrait le sol et les meubles, se tenait, plantée au milieu de la pièce encombrée, une silhouette sombre, silencieuse et encapuchonnée.

- Qui êtes-vous ? Et que faites-vous chez moi ? tonna le journaliste en s’arrêtant brusquement dans l’encadrement de la porte.

Dans sa vie de journaliste, Mohok avait déjà été confronté aux insultes, aux menaces de mort et parfois même à de l’intimidation physique. A deux occasions déjà il avait été cambriolé. Mais c’était bien la première fois qu’on l’attendait chez lui.

- Vous êtes Mohok Likki ? Le journaliste ?
- Non, je suis sa femme : Bernadette.

L’inconnu parut déstabilisé par la réponse du propriétaire des lieux qui en profita pour se glisser lentement vers la cuisine où se trouvait une multitude d’objets tranchants. Pendant qu’il se déplaçait, le journaliste vieillissant enregistrait mentalement tous les détails qu’il pouvait sur son visiteur intempestif : sweat à capuche noir ; plutôt petit ; voix jeune, presque juvénile ; pas d’arme visible mais des Pokéball à sa ceinture ; probablement un jeune voyou désœuvré.

- Qu’est-ce que vous lui voulez à Mohok ? demanda-t-il pour meubler le silence et distraire son agresseur.
- Mmpfh ! Je veux lui remettre des informations capitales sur les méthodes de recherches menées par la Fondation Æther et de ses connexions avec la Team Skull. N’est-ce pas lui qui cherche à discréditer Elsa-Mina pour l’empêcher d’être élue Maître lorsqu’Alola entrera dans la Convention ?

Mohok s’arrêta, surpris. Un couteau qui trainait sur le plan de cuisine n’était qu’à deux mètres de lui. Il plissa les yeux et observa le gamin avec un intérêt accru. Etait-il sincère ou bien était-ce là un appât pour lui faire baisser sa garde ? Finalement, sa curiosité journalistique emporta ses réticences.

- Admettons que ce soit vrai. Qu’est-ce qu’un petit vagabond pré-pubère peut avoir comme renseignement sur les agissements de la Fondation que moi-même je n’aurais pu obtenir ?
- Parce que je ne suis pas n’importe quel vagabond pré-pubère venu ! grinça le jeune garçon. Alors, vous les voulez ou pas ces renseignements ? Je n’ai pas beaucoup de temps.

Le journaliste acquiesça sans répondre. Le petit voyou se baissa pour ramasser un sac à bandoulière qui reposait à ses pieds et le tendit dans sa direction.

- Voilà. Tout est là, dit-il simplement. Prenez et faites… Faites ce que vous pourrez. (Sa main ne tremblait pas.) Mais soyez prudent. La Fondation donnerait cher pour les récupérer. Bien plus que ce que vaut votre vie aux yeux de ma… à leurs yeux.

Maintenant complètement hameçonné, Mohok s’éloigna du couteau du coin cuisine et s’approcha à petits pas. Lorsqu’il fut à portée du sac, il l’empoigna et jeta un œil à l’intérieur.

- Qu’est-ce que c’est que ces machins ? s’écria-t-il en saisissant l’un des petits disques plats parmi la vingtaine qui se trouvait dans le sac.
- La mémoire de ceux tombés au champ d’Honneur.
- Ok. Super. Comment je me sers de ce truc ? On dirait une Capsule Technique. C’est en donnant ça à un Pokémon que je vais découvrir ce que trame la Fondation ? demanda-t-il en observant le fond du sac avec circonspection.

Il y en avait un peu plus d’une quinzaine, chacun des petits disques étant d’une couleur différente. Celui qu’il tenait avait des reflets orangés avec une partie plus sombre, presque marron, sur un côté.

- En principe le fonctionnement est le même, confirma son mystérieux informateur, mais il est peu probable que ça fonctionne sans le bon Pokémon. Le plus simple serait plutôt d’insérer les ROM dans un PC et ils vous livreront tous leurs secrets.
- T’es mignon, gamin. Mais est-ce que tu as vu un seul truc qui ressemble de près ou de loin à de l’informatique par ici ?

En effet, Mohok était réfractaire à tout ce qui touchait de près ou de loin à la technologie. Pour lui rien ne pouvait surpasser le fait de faire soi-même les choses au lieu de laisser une machine sans âme s’occuper de tout. Il ne possédait même pas son propre téléviseur et c’était pour cela qu’il devait visionner toutes ces émissions dans les locaux de son journal en compagnie de Jamila. Les seules « machines » qu’il possédait étaient un téléphone filaire, le grille-pain et sa vieille machine à écrire. Même son café était fait avec de l’eau qu’il faisait bouillir lui-même.

C’était en partie à cause de son aversion pour la technologie qu’il voyait d’un mauvais œil la montée en popularité de la dirigeante de la Fondation Æther et quand les premières rumeurs sur des agissements peu recommandables avaient vu le jour, il avait choisi de creuser le sujet.

- Vous… Vous n’avez pas de PC ? demanda platement son interlocuteur comme s’il avait besoin de l’énoncer à haute voix pour y croire.

Mohok haussa les épaules et mit sans y penser le petit disque marron dans la poche de son pantalon.

- Non. Mais je connais quelqu’un qui saura exactement quoi faire.
- Parfait. Il faut que j’y aille maintenant. Je vous le dis une dernière fois : faites très attention. Maintenant que les ROM sont en votre possession, vous êtes en danger constant. Ne faites confiance qu’aux personnes dont vous êtes certain de la loyauté.

La conversation étant terminée, le gamin se dirigea vers la sortie. Encore légèrement suspicieux envers ce jeune individu qui entrait par effraction chez les honnêtes gens, Mohok le suivit jusqu’au porche. L’ignorant complètement, le mystérieux voyou décrocha une des Pokéball à sa ceinture et fit apparaitre une Poké-Monture que le journaliste n’avait jamais vu jusque-là.

C’était un quadrupède au pelage très sombre mais dont les pattes antérieures ressemblaient à celles d’un insecte tandis que la queue adoptait les formes élégantes d’un Pokémon aquatique. Au-delà de l’effet patchwork de la créature, c’était l’étrange casque de métal qui lui enclavait le cou et masquait complètement ses traits, à l’exception de deux traits gris ternes à l’emplacement des yeux, qui insufflait à la chose une aura dérangeante.

Un son caverneux, métallique, qui semblait naitre des tréfonds d’une grotte insondable, s’échappait des rebords métalliques. Il allait se répercuter en écho sinistre contre les murs des maisons comme le faisait le bruit des vagues venues se fracasser contre une digue pierreuse lors de la marée haute. C’était une tonalité d’outre-tombe, d’une bête torturée, qui vous râpait l’âme à l’instar du crissement de craie sur un tableau noir.

Une respiration laborieuse, difficile, qui faisait :
« Hou… Aaaah… Houuuu… Aaah… Houuuu… Aaaaah… Houuu… Houuu… Aah… »

Impressionné, le journaliste cligna des yeux, comme s’il cherchait à se convaincre que ce monstre ne s’échappait pas d’un cauchemar. Lorsqu’il souleva à nouveau ses paupières, l’inconnu encapuchonné comme la fantasque chimère avaient disparu. C’étaient comme s’ils n’avaient jamais existé et seul le râle trépassé de la bête raisonnait en carillonnant à l’intérieur de son crâne enfiévré.

Avait-il rêvé ? Non. Le sac à bandoulière contenant les ROM reposait toujours dans son salon, exactement à l’endroit où il l’avait laissé. Il s’en approcha avec respect. Maintenant qu’il avait vu le Pokémon du jeune garçon, il devinait que ce qu’il lui avait raconté n’étaient pas que des affabulations : il avait maintenant en sa possession des preuves qui pourraient mettre à mal l’image de la Fondation. Restait à découvrir ce que contenaient ces preuves.

Il resta un moment prostré là, à supporter tout le poids du monde, les yeux fixés sur le sac dont l’ouverture laissait entrapercevoir son fabuleux contenu. Puis, reprenant conscience, il se précipita sur son téléphone.

*


La nuit était calme lorsqu’il sortit de sa demeure. On entendait seulement le chuchotis du vent qui secouait les branches des palmiers et le roulement des vagues sur le rivage au loin. De temps à autre, un Brindibou hululait sous le ciel dégagé. Mohok leva le nez et vit l’océan tacheté d’étoiles suspendu au-dessus de lui.

Le sac serré contre son flanc, le journaliste se sentait fébrile. Il allait peut-être l’avoir ce fameux temps qui lui faisait défaut. Si le contenu des ROM était une vraie preuve, alors il aurait une chance d’empêcher Elsa-Mina d’être nommée Maître Pokémon.

Il traversait la rue pour rejoindre le trottoir d’en face quand les feux d’un véhicule se braquèrent soudainement sur lui. Il plissa les paupières en grommelant dans sa moustache contre l’incivilité des automobilistes.

Puis, on entendit le crissement de pneus qui accélèrent sur le bitume et un long frisson couru le long de l’échine de Mohok. Le pâle éclat sélénite donnait une teinte grisâtre à son visage anguleux et sa moustache cendrée frémit un moment.

Il plongea ses yeux dans la lumière blanche et aveuglante de ce qu’il crut être une limousine de couleur claire. Le vieux journaliste pensa à la cigarette qu’il aurait pu avoir à la bouche à ce moment. Ç’aurait été tellement bon. Puis il y eut choc violent et les étoiles se mirent à tournoyer.
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